Montagne et solitude
MONTAGNE ET SOLITUDE
écrit au Refuge de Tucquerouye.
Une route est maussade au pas qui se fait lourd.
Dans cette immensité, mes passions s’éveillent :
Tout semble démesure et conforte ma peine.
À mes sens endormis se fonde une chimère
Donnant forme et naissance aux espoirs les plus fous…
J'anime chaque souffle en désir, en attente
Où s'offre ton visage.
J'espérais t'enlacer pour crier mon amour
Sans cependant savoir me dévoiler amant.
Pourrais-je vivre un jour à l'ombre de moi-même ?
Vous êtes bien ensemble et tissez quelques liens
Pour me laisser tout seul, abandonné, sans pair.
Qui se sentait de taille à conter ma nature ?
Sachez-le, dites-le : je ne suis pas d’ici,
Cette époque m’ennuie.
Si mon rire vous sied, un sourire ou ces larmes,
Je vous laisse apaiser votre soif à la source...
Elle ne peut tarir, elle est là pour vous plaire !
Mais, vous tous, entendez, il n'y aura personne
À songer une nuit, près de moi dans ma couche,
Animer un instant les rêves merveilleux
D'une vie partagée...
D'une vie sans partage.
Montagne tu es là pour me montrer le ciel.
Ta présence me donne en ces jours douloureux
La force de jaillir au-delà du néant.
Illusion ?
Chimère ?
Comme toi je suis seul.
L'enfant qui près de moi s'approche radieux
Semble une simple pierre, une fleur ou quelqu’ange
Et ne saurait percer les secrets de mon être.
S'il vous plaît de me voir sous un autre visage,
Oubliez mes propos : j'oserai m’éveiller
Pour surgir dans vos nuits ; hanter cette existence
Que chacun de vous gâche et ne mérite pas.
Comment t'ai-je un hiver imaginé dans l'ombre,
Ô présence impossible, aux flammes d'un grand feu ?
Mirage d’une nuit ?
Ce fut un court printemps n'ayant pas à l'été,
À l'automne de même, osé le moindre espoir
Pour la fleur et le fruit d'un amour passionné.
Tout devra s'achever lorsque chacun des pas
Tracé sur ce chemin sera pour l’un et l’autre
Un lointain souvenir.
J'aurai versé le sang afin de prendre vie
Et voici que je meurs avant d'avoir aimé.
© Yves Philippe de FRANCQUEVILLE.
les peintures sont de Franck PASQUALINI ©
(voir légendes dans la galerie photo).
Poème extrait du recueil Solitude étrangère. Il apparaît aussi en chant dans la pièce de Théâtre Notre Sauveur, écrits d'Yves Philippe de FRANCQUEVILLE.
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